samedi 12 novembre 2011

La CGT craint que "France Soir" ne devienne un organe du FN

Le syndicat Info'Com CGT de France Soir redoute que le quotidien fondé par Pierre Lazareff devienne un organe de propagande du Front national, après que son propriétaire russe a annoncé qu'il voterait pour Marine Le Pen à l'élection présidentielle de 2012.
Interrogé sur ses intentions de vote dans l'édition Médiasphère de LCI, vendredi 11 novembre, Alexandre Pugachev, qui a la nationalité française, a déclaré dans un français approximatif : "Je tente vers Marine Le Pen." Alors que le journaliste lui demande s'il parle sérieusement, l'homme d'affaires répond : "Il y a 20 % quand même des intentions de vote pour elle." "Il n'y a pas beaucoup qui se déclarent [publiquement en sa faveur] mais je ne vois pas pourquoi, c'est pas une fasciste", ajoute-t-il.

"UNE LIGNE ÉDITORIALE POPULISTE NAUSÉABONDE"

Dans un communiqué, le syndicat Info'Com CGT de France Soir estime que le "faux-nez du projet Pougachev vient de tomber". "Pour le milliardaire, le repreneur idéologique de France Soir, c'est le Front national !", écrit le syndicat, dénonçant une "nouvelle dérive" après la publication de communiqués validant "les déviations d'une ligne éditoriale populiste nauséabonde", selon lui.

"Jamais le Comité Inter CGT et Info'Com CGT ne pourront accepter que France Soir devienne un nouveau canal des thèses de l'extrême droite", met en garde le syndicat.

Réagissant à cette confidence, la Société des journalistes (SDJ) de France Soir a également exprimé sa "vive consternation" dans un communiqué. "Qu'il vote pour la candidate Front national lors de la présidentielle ne regarde que lui ; qu'il l'affirme, publiquement et ès qualité, engage, malgré eux, tous les salariés de l'entreprise qu'il préside et ses journalistes en particulier", ajoute la SDJ, qui "souligne sa volonté de préserver une forme de neutralité et d'équilibre politiques".

Selon Renaud Revel, journaliste de L'Express spécialisé dans les médias, M. Pougachev aurait notamment proposé une série de couvertures sur l'immigration en 2010.

INQUIÉTUDE SUR L'AVENIR DU QUOTIDIEN

Les salariés de France Soir et leurs soutiens ont manifesté jeudi devant le ministère de la culture et de la communication à Paris pour exprimer leur inquiétude sur l'avenir du quotidien.

Le journal a été placé sous protection de la justice (clause de sauvegarde) en août et M. Pougachev a annoncé en octobre qu'il envisageait l'arrêt de l'édition papier pour faire un journal gratuit sur Internet, en supprimant 89 emplois sur 127. L'arrêt de l'édition papier est théoriquement prévue mi-décembre et la fin de la procédure de sauvegarde juste avant Noël.

France Soir, qui vendait plus d'un million d'exemplaires dans les années 1960 quand il était le titre phare de la presse quotidienne française, deviendrait ainsi le premier quotidien national en France à quitter le support papier.

M. Pugachev, fils d'un milliardaire russe, a expliqué sa décision par l'impossibilité de redresser les comptes du journal, qui devrait perdre encore 19 millions d'euros cette année. France Soir, qui vend en moyenne 70 000 exemplaires par jour, visait selon sa direction 100 000 exemplaires pour devenir rentable.

LA CGT EN APPELLE AU GOUVERNEMENT

Vendredi, il s'est dit aussi prêt à vendre France Soir pour un euro symbolique si le repreneur s'engage à faire vivre le journal sur le papier et à en payer les dettes, soit 3 millions d'euros, selon lui.

De son côté, Christiane Vulvert, ancienne directrice générale du journal, a proposé une reprise du titre, moyennant un apurement des dettes et du passif, une participation du vendeur aux pertes de la première année et la suppression d'une trentaine de postes.

Le syndicat Info'Com CGT de France Soir en appelle au gouvernement et en particulier au ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, qui s'est engagé jeudi à soutenir tout projet qui s'articulerait autour du papier et du Web, et non sur le seul Web. "Les aides à la presse peuvent-elles aider au développement des idées nauséabondes du Front national ?", demande-t-il.

Des personnalités de la presse et des élus ont apporté leur soutien au quotidien, à l'image des députés Marie-George Buffet (PCF), Claude Bartolone (PS), Noël Mamère (EE-LV), Jack Lang (PS) et Christian Estrosi (UMP).

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