mercredi 21 décembre 2011
Dettes européennes: le FMI entre en jeu
Incapable de s'aider elle-même, l'Europe va faire appel au Fond monétaire international pour aider ses pays les plus en difficulté. Après une réunion téléphonique de leurs ministres des Finances, lundi, les dix-sept pays de la zone euro vont renflouer le FMI afin que celui-ci puisse mieux venir en aide au vieux continent. L'institution mondiale dirigée par Christine Lagarde est-elle la réponse aux malheurs de l'Europe ? Les clefs pour comprendre.
La zone euro ne peut-elle pas s'aider elle-même ?
Le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a été mis sur pied pour accorder des prêts aux pays en difficulté, et garantir une partie de la dette souveraine achetée par les investisseurs. Mais les Européens ont reconnu que sa force de frappe n'atteindrait sans doute pas les objectifs annoncés.
De plus, le sort du FESF est étroitement lié à celui pays qui garantissent ses fonds. L'agence de notation Fitch a rappelé ce mardi que la note du Fonds était étroitement liée à celle de France, elle-même menacée de dégradation imminente. Il est donc désormais clair que le FESF n'aura pas les reins assez solides pour secourir, seul, les Etats en difficulté.
Quant à la Banque centrale européenne, seule institution capable d'endiguer la crise, elle refuse d'intervenir autrement qu'à doses réduites, pour ne pas transgresser des statuts qui lui imposent d'abord de veiller à la stabilité de la monnaie et à l'inflation.
Prêter au FMI pour qu'il nous prête en retour : quelle logique ?
On peut s'étonner de cet aller-retour de fonds entre l'Europe et le FMI. «Ce plan n'a aucune justification, fulmine Henri Sterdyniak, directeur de recherche à l'OFCE. Sinon que le traité européen stipule que les pays n'ont pas le droit de se renflouer les uns les autres [article 125 du traité, ndlr]. Donc la France, au lieu de prêter directement à la Grèce ou à l'Espagne, prête au FMI qui prêtera lui-même à ces pays. Et on fait semblant que l'une et l'autre opération n'ont aucun rapport entre elles».
Reste qu'en l'état actuel des traités, et vu l'impuissance des mécanismes "100% européens", le FMI représente un recours suffisamment rapide et crédible pour faire face aux difficultés les plus immédiates. «Le but, en soi, n'est pas de re-prêter immédiatement cet argent aux pays en difficultés, explique l'économiste Philippe Dessertine. Il s'agit d'abord faire baisser les taux d'intérêts auxquels ces pays empruntent, en disant aux marchés: en cas de problème, le FMI se tient prêt à intervenir».
Qui va participer ?
Les 17 pays de la zone euro se sont mis d'accord pour apporter 150 milliards d'euros. La France contribuera au chèque à hauteur de 31,4 milliards d'euros, l'Allemagne assurant la contribution la plus élevée avec 41,5 milliards. Trois pays membres de l'UE, mais pas de la zone euro, particperont aussi à l'opération: la Suède, le Danemark et la Pologne. Les Européens espèrent ainsi attendre les 200 milliards d'euros.
Reste à savoir si les pays émergents —Chine, Russie, Inde, Brésil...— se laisseront convaincre de mettre au pot, eux aussi. Chose qu'ils avaient refusé de faire dans le cadre du FESF. «Je ne m'attends pas à une grosse participation de leur part, poursuit Philippe Dessertine. Ils sont eux aussi aux prises avec un ralentissement économique, sans compter des problèmes géopolitiques, comme en Russie. Ils vont donc être très prudents dans leur approche de cette opération, dont le succès est loin d'être certain».
Que va régler ce plan ?
Le plan Europe-FMI ne mettra pas un terme à la crise. Il s'agit plutôt de répondre en catastrophe à la pression sans cesse montante sur les dettes souveraines, et face à laquelle les outils européens se sont révélés impuissants.
Les 200 milliards qu'espère lever l'Europe, et qui seront mobilisables à tout instant par le FMI, peuvent avoir un effet "apaisant" sur les investisseurs à deux ou trois mois d'horizon. Si un pays n'arrive plus à se financer sur les marchés, il pourra se tourner vers le FMI, qui leur prêtera à des taux plus bas.
Au-delà se poseront de nouveau les problèmes de fond auxquels n'ont pas su —voulu ?— répondre les derniers sommets européens: solidarité budgétaire, intégration économique et politique.
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